Par Marc Bergougnoux, ex CEO
Comme évoqué lors de nos précédents articles et newsletters, vous trouvez dans ce corner des articles de fond, de réflexion et de procédures ; nous explorons progressivement chacun de ces outils juridiques que vous avez à votre disposition en tant que Chef d’Entreprise pour vous aider en cas de difficultés.
Nous avons évoqué au cours des précédentes newsletter le rôle essentiel de la Prévention et la détection de la cessation de paiement, nous allons plus particulièrement zoomer dans cet article sur une première procédure à votre disposition que vous pouvez activer à tout moment par simple requête écrite auprès du Président du Tribunal de Commerce ou du Juge auquel il a délégué la Prévention : le mandat ad hoc.
Le mandat ad hoc c’est quoi ?
Le mandat ad hoc, issu de la pratique des tribunaux de commerce, est défini par l’article L. 611-3 du code de commerce selon lequel « le Président du tribunal de commerce ou de grande instance peut, à la demande du représentant de l’entreprise, désigner un mandataire ad hoc dont il détermine la mission »
Cette unique disposition légale atteste de la volonté du législateur de ne pas encadrer le mandat ad hoc, de manière à préserver sa souplesse et sa confidentialité.
C’est une procédure à votre main.
Quelle est la durée de la mission ?
L’article L. 611-3 ne prévoit aucune limitation de durée, celle-ci est librement fixée puis éventuellement renouvelée par le Président qui veillera à ce qu’elle soit adaptée à la situation.
Une durée optimale est entre 4 et 6 mois avec obligation de rapports d’étape.
Comment est déterminé son contenu ?
Librement déterminée par le Président, elle doit être adaptée à votre demande de dirigeant et aux besoins de votre entreprise.
Les cas habituels d’utilisation sont :
- des difficultés économiques (par exemple, perte d’un marché) ;
- des difficultés financières (par exemple, retard dans le paiement des cotisations sociales ou des impôts, difficulté de remboursement d’un crédit)
pour lesquels un tiers rompu à ces difficultés vous accompagnera dans vos négociations.
Ordonnance d’ouverture
L’ordonnance du Président ouvrant la procédure définit la durée et le contenu de la mission du mandataire ad hoc ou du conciliateur désigné ; il y est annexé les conditions de leur rémunération et leur attestation sur l’honneur prévue par L. 611-13.
L’ordonnance de désignation du mandataire ad hoc vous est notifiée par lettre simple et, par LR/AR, à votre commissaire aux comptes s’il en a été désigné un (R. 611-20).
L’ordonnance ne fait l’objet d’aucune publicité.
Quelles sont vos voies de recours ?
En cas de refus de désignation, vous pouvez interjeter appel, par déclaration faite ou adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au greffe du tribunal. Le Président peut dans un délai de 5 jours modifier ou rétracter sa décision ; dans le cas contraire, le greffier transmet sans délai le dossier au greffe de la cour d’appel (R. 611-20 et R. 611-26).
Confidentialité
L’article L. 611-15 précise que « toute personne qui est appelée à la procédure de mandat ad hoc ou qui, par ses fonctions, en a connaissance, est tenue à la confidentialité« .
Afin de préserver la confidentialité l’ordonnance n’est pas publiée ni portée au RCS.
Il n’est prévu aucune mesure de sanction, qu’elle soit civile ou pénale, en cas de non respect de cette confidentialité, ce qui en réduit quelque peu la portée
Combien ça coûte ?
Il est certain que la complexité du dossier et l’enjeu économique sont des critères essentiels. Le législateur précise simplement, (L. 611-14), que cette rémunération est fonction des « diligences qu’implique l’accomplissement de la mission ».
La fixation de la rémunération est très délicate et doit être adaptée à chaque situation particulière.
Il est recommandé de fixer une rémunération totale maximum au travers d’une convention en général annexée à l’ordonnance d’ouverture de la procédure
Quand est-ce que la procédure se termine ?
Quel Formalisme ?
La mission du mandataire ad hoc prend fin :
- soit à l’expiration du délai fixé à l’ouverture sans formalité particulière (R. 611-21),
- soit par ordonnance du Président,
- soit par votre demande,
sans attendre l’expiration du dit délai.
La procédure peut déboucher :
- sur le succès de la mission et la conclusion d’un accord amiable
- sur l’échec de la mission
L’accord amiable ne fait l’objet d’aucun formalisme ; sa forme et son contenu dépendent de la mission qui avait été définie et des accords.
Il peut s’agir d’une simple lettre adressée au débiteur par ses créanciers, ou de la conclusion d’un véritable « protocole d’accord » signé par toutes les parties, mais sans intervention du tribunal ou de son Président.
Cet accord ne fait l’objet d’aucune publicité et ne produit d’effet qu’à l’égard de ses signataires.
Si les parties souhaitent formaliser davantage leur accord, elles peuvent alors mettre fin au mandat ad hoc et demander l’ouverture d’une procédure de conciliation, de manière à aboutir à un accord de conciliation, qui pourra être constaté ou homologué, comme nous le verrons lors de notre prochain article sur la procédure de conciliation
Ressources documentaires :
• Conférence Générale des Juges Consulaires
• Ressources de formation de l’École Nationale de la Magistrature