Par Christelle Chazelle, DAF à temps partagé – Gestion financière et performance économique
« 2025 ne sera pas une année facile pour les dirigeants » : une affirmation récurrente qui contribue à assombrir le futur des entreprises. Il est vrai que les contextes géopolitiques, économiques et fiscaux actuels compliquent le quotidien des chefs d’entreprise. Cependant, l’avenir laisse encore place à de nombreuses opportunités si les projets de développement répondent à un besoin réel et qu’ils s’adressent à de vrais clients, en capacité de payer.
Pour garantir la maîtrise du développement et anticiper les coups durs, il me parait essentiel de se recentrer sur la gestion financière de l’entreprise en revenant à des fondamentaux simples.
Voici quelques conseils pratiques pour aborder cette année complexe.
« Un prévisionnel toujours faux ! »
- Les processus budgétaires actuels prennent en compte les constats suivants :
- Accès très difficile au financement et au crédit,
- Hausse des coûts du crédit,
- Inflation persistante et pression accrue sur les marges,
- Croissance faible.
Il est donc essentiel de mettre en place des systèmes de gestion efficaces, de formaliser clairement son plan d’investissement et de prévoir un plan de trésorerie sécurisé, régulièrement mis à jour.
Dans le cadre de mes missions, J’interviens fréquemment dans des structures jeunes, innovantes, encore peu structurées et en développement. L’établissement d’un prévisionnel financier est un exercice compliqué parce qu’il est difficile de prévoir le futur mais surtout parce qu’il est difficile d’accepter que le prévisionnel sera faux.
Et pourtant, un prévisionnel est généralement faux ! L’important n’est pas d’être capable de le suivre à la lettre mais de pouvoir faire des ajustements au bon moment et éviter une gestion à vue.
Quels enjeux clés dans ces structures ?
Se concentrer sur la fiabilité des données financières : la comptabilité est souvent externalisée. Les dirigeants ont donc tendance à se concentrer sur le business et considérer que la comptabilité est juste une obligation administrative. Or, les données comptables constituent la base des comptes annuels. Il est primordial de comprendre tous les impacts des décisions de gestion prises chaque année et de les intégrer dans les reportings internes. Quelques sujets récurrents : prise en compte du mode de reconnaissance du chiffre d’affaires (décalages possibles), de la méthode de comptabilisation des subventions et des amortissements ainsi que des règles établies pour la gestion de la production immobilisée.
Anticiper l’atterrissage du bilan avant la clôture : le bilan, photographie du patrimoine de l’entreprise à la date de clôture et « vitrine annuelle », sert de référence pour des partenaires financiers. Il est donc judicieux de repérer et suivre les ratios clés de l’entreprise. La 1ère donnée à maîtriser est le niveau des fonds propres qui, en période de crise, ne permet pas de profiter des meilleurs effets de leviers.
Maîtriser les outils de gestion fondamentaux :
- Le budget annuel permet d’anticiper la rentabilité et le résultat de l’année en cours,
- Le business plan formalise la vision stratégique à 5 ans et les besoins de financement,
- Le prévisionnel de trésorerie permet de gérer mensuellement l’étalement des flux d’encaissement et de décaissement,
- Le pipeline commercial et le carnet de commandes clients permettent d’évaluer la solidité des prévisions commerciales,
- Le détail des coûts de production via la BOM (Bill of Materials) donne une bonne idée des marges dégagées et des postes d’achats optimisables.
Dialoguer régulièrement avec ses partenaires financiers afin de préserver une relation de confiance et démontrer sa capacité à anticiper.
S’assurer que vous construisez un Business Model rentable avec un accès au marché assez court : vous gagnerez en autonomie financière et faciliterez votre accès aux financements.
Quels réflexes pour financer son développement ?
Suivre son business plan à 5 ans : structurer la vision du dirigeant, projeter des hypothèses de développement à long terme et anticiper les besoins d’investissement
Penser à Intégrer des marges de sécurité et à réévaluer les délais de réalisation espérés dans tous les prévisionnels : ces données sont trop souvent sous-estimées.
Éviter de faire des investissements sur fonds propres : la sortie de cash est immédiate pour des investissements qui souvent sont sensés rapporter des bénéfices à long terme
Anticiper les levées de fonds : commencer les démarches au moins un an avant le point critique de trésorerie.
Mobiliser des financements complémentaires non dilutifs lorsque vos fonds propres sont importants : se financer au bon moment et avant d’engager des investissements lourds.
Optimiser le besoin en fonds de roulement (BFR) : analyser séparément les composantes du BFR pour identifier des possibilités d’optimisation :
- Suivi rigoureux et régulier des factures impayées,
- Gestion optimisée des stocks et de leur rotation (attention à la vétusté),
- Suivi des projets de R&D subventionnés afin d’obtenir des versements plus rapidement
- Négociation d’avances à la commande.
Mettre en place un prévisionnel de trésorerie à 24 mois, réactualisé mensuellement.
La gestion de trésorerie, un enjeu central
Dans les structures innovantes en phase d’amorçage, la trésorerie est souvent le principal indicateur de gestion. C’est normal et donc plutôt bien en période tendue. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, la gestion de trésorerie est essentielle mais elle ne doit pas être le seul facteur de décision. Pour investir et prendre des risques, le dirigeant doit s’affranchir d’une vision uniquement court-termiste.
Faire appel à un directeur financier à temps partagé est une solution judicieuse. Ce dernier accompagne la stratégie financière, assure un suivi rigoureux de la trésorerie, assume les pics de trésorerie en libérant une partie de la charge mentale du dirigeant et aide à poursuivre le plan de développement.
Les périodes de crise sont finalement l’occasion de revenir à des logiques de gestion solides. En anticipant les besoins financiers tout en restant agiles, les dirigeants peuvent transformer les défis en opportunités. En 2025, la maîtrise de la gestion, du financement et de la trésorerie sera plus que jamais au cœur de la réussite des entreprises.