Par Marc Bergougnoux, Ex C.E.O. Groupe HBF
Comme évoqué lors de nos précédents articles, vous trouvez dans ce corner des articles de fond, de réflexion et de procédures ; nous explorons progressivement chacun de ces outils juridiques que vous avez à votre disposition en tant que chef d’entreprise pour vous aider en cas de difficultés.
Nous allons traiter aujourd’hui de la sauvegarde.
La sauvegarde c’est quoi ?
Vos difficultés économiques, financières ou juridiques sont avérées, et vous n’êtes pas en cessation de paiement depuis plus de 45 jours, la procédure de sauvegarde devrait vous permettre de recouvrer une bonne situation et vous aider à remédier à vos difficultés.
Veuillez noter toutefois que cette procédure n’est pas confidentielle. Le jugement d’ouverture est mentionné au RNE et au registre du commerce et des sociétés s’il s’agit d’une société commerciale.
C’est la dernière procédure à votre initiative vous permettant de traiter le plus en amont les difficultés auxquelles vous avez à faire face.
La procédure de sauvegarde vise également à préserver l’emploi en permettant à l’entreprise de poursuivre son activité.
Conditions d’ouverture
C’est vous, en tant que représentant légal de l’entreprise, qui avez l’initiative de déposer une demande d’ordonnance de sauvegarde qui s’appuie sur un ensemble de documents à fournir. Vous trouverez sur le site internet du Greffe du Tribunal de Commerce dont vous dépendez toutes les précisions utiles. A minima vous devrez fournir :
- La copie de votre pièce d’identité en tant que représentant légal de l’entreprise,
- Le numéro unique d’identification délivré par l’INSEE,
- Un état d’endettement datant du jour du dépôt,
- Les comptes annuels du dernier exercice,
- Une situation de trésorerie de moins de 8 jours,
- Un compte de résultat prévisionnel,
- Un état chiffré des créances et des dettes précisant l’identité et les coordonnées des créanciers,
- Une attestation sur l’honneur certifiant l’absence de désignation d’un mandataire ad’hoc ou l’ouverture d’une conciliation dans les 18 mois précédant la demande ou, dans le cas contraire, une attestation faisant état d’une telle désignation ou de l’ouverture de la procédure et mentionnant sa date ainsi que l’autorité qui y a procédé.
- Vous pouvez proposer un administrateur à la désignation du Tribunal,
- …
et ce, dans un nombre d’exemplaires tel que demandé par le Greffe.
Dans son ordonnance d’ouverture, le Tribunal autorise la poursuite de l’activité. La situation de l’entreprise ainsi que l’issue de la procédure seront examinées par le Tribunal dans le cadre d’audiences ultérieures sans la présence du public.
Les intervenants désignés
Ces intervenants sont désignés lors du jugement d’ouverture de la procédure.
- Un mandataire judiciaire : il est chargé de représenter les créanciers et de vérifier le passif de votre entreprise.
- Un juge-commissaire : il s’agit d’un juge du Tribunal qui suivra le déroulement de la procédure, il veillera notamment à son bon déroulement et rendra des décisions dans les matières relevant de sa compétence et à la protection des intérêts en présence. Le juge commissaire est lui aussi chef d’entreprise, une particularité qui optimise sa capacité à traiter les dossiers dont il a la charge.
- Un administrateur judiciaire dans le cas où l’entreprise dépasse certains seuils :
- le nombre de ses salariés doit être supérieur à 20,
- ou son chiffre d’affaires doit être supérieur à 3 millions d’euros hors taxes,
- ou le total du bilan supérieur à 1.5 million d’euros,
- ou, si le Tribunal estime son intervention nécessaire, celui-ci détermine alors sa mission.
- Il a pour mission générale de vous assister pendant la procédure.
Les effets de la procédure
La sauvegarde entraine le gel des dettes antérieures dès l’ouverture de la procédure et a pour objectif l’élaboration d’un plan permettant leur remboursement sur une durée maximale de 10 ans.
Pour quelle durée ?
- Une première période de six mois renouvelables ;
- Une seconde période de six mois non renouvelables ;
- Plan d’apurement de la dette et de continuation sur dix ans au maximum ;
- C’est la constatation de la bonne exécution du plan de sauvegarde qui met un terme à cette procédure.
Il est à noter qu’en cas de conversion de la sauvegarde en redressement judiciaire, le Tribunal peut proroger de 6 mois supplémentaires la période d’observation (articles L.621-12 et L.622-10 al.5 du code de commerce).
Les différentes issues de la procédure
Aux termes de l’article L. 620-1 du Code de commerce, la procédure de sauvegarde « est destinée à faciliter la réorganisation de l’entreprise afin de permettre la poursuite de l’activité économique, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif. » Cela se concrétise par :
- L’adoption d’un plan de sauvegarde ;
- L’adoption d’un plan de cession de l’entreprise ;
- En cas d’échec :
- Conversion en redressement judiciaire ;
- Conversion en liquidation judiciaire.
Le saviez-vous ? Quelques cas pratiques…
Dois-je payer normalement les factures que je reçois ?
- Seulement celles qui correspondent à des livraisons ou prestations réalisées depuis la date du jugement d’ouverture de la procédure.
- Les dettes antérieures sont provisoirement gelées, vous n’avez pas à les régler et aucune poursuite judiciaire en paiement de ces dettes antérieures ne peut être exercée contre l’entreprise.
Quel est mon rôle pendant la période d’observation ?
Vous restez en charge de l’administration de l’entreprise. Toutefois, si un administrateur judiciaire est désigné, il pourra vous assister dans tous les actes relatifs à la gestion de l’entreprise selon l’étendue de la mission qui lui sera confiée.
Puis-je conserver ma rémunération antérieure ?
En sauvegarde, il vous appartiendra d’apprécier son montant,
Veuillez noter que cet article n’est qu’un « digest » très condensé, nous ne saurions que trop vous recommander de vous rapprocher de vos Conseils habituels.
Si vous n’avez pas résolu vos difficultés, ou que la procédure n’a pas abouti, le Tribunal la convertira en redressement judiciaire, éventuellement en liquidation judiciaire.
Nous verrons ces procédures au cours de nos prochains articles… N’hésitez pas à nous contacter si vous rencontrez des difficultés afin de vous aider à identifier la procédure adaptée à votre situation.
Ressources documentaires :
- Conférence Générale des Juges Consulaires
- Ressources de formation de l’École Nationale de la Magistrature